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Abus de biens sociaux

DÉFINITION

Ce n’est pas le Code pénal mais le Code de commerce qui incrimine l’abus de biens sociaux. Cette expression désigne l’utilisation des biens d’une société commerciale par son gérant, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société qui l’intéresse.

Deux textes incriminent l’abus de biens sociaux à savoir les articles L.241-4 et L.242-6 du Code de commerce.

PERSONNES RESPONSABLES

Seul peut être poursuivi et reconnu responsable du délit d’abus de biens sociaux le dirigeant d’une société commerciale : ainsi l’article L.241-4 du Code de commerce incrimine le délit commis le gérant d’une société à responsabilité limitée (SARL) et l’article L.242-6 par le président d’une société anonyme (SA) ou d’une société par actions simplifiée (SAS).

Ainsi, doit être considéré comme irrecevable la plainte pour abus de biens sociaux dirigée contre le dirigeant d’une société civile (SCI ou SCM), les associés non dirigeants d’une société commerciale ou contre les salariés de la société.

Lorsqu’il s’agit de détournements de biens réalisés par un associé ou un salarié, ces derniers sont qualifiés d’abus de confiance. Le prévenu encourt alors une peine de trois ans de prison et 375 000 € d’amende. Cette infraction est similaire à l’abus de biens sociaux.

La société ne peut être considérée comme responsable, puisqu’elle est par définition la victime de l’abus de biens sociaux.

PEINES PRINCIPALES ET COMPLÉMENTAIRES

L’abus de bien sociaux simple est puni tant par l’article L.241-4 que l’article L.242-6 du Code de commerce de 5 ans d’emprisonnement et de 375.000 euros d’amende.

Les peines principales sont portées par ces mêmes textes à sept ans d’emprisonnement et de 500.000 € d’amende lorsque le délit a été réalisé ou facilité au moyen soit de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d’organismes établis à l’étranger, soit de l’interposition de personnes physiques ou morales ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable établis à l’étranger.

Ces deux textes prévoient en outre à titre de peines complémentaires :

 

  • l’interdiction des droits civiques, civils et de famille,
  • l’interdiction, soit d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, soit d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour leur propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d’exercice peuvent être prononcées cumulativement.

PRATIQUE

Le point déterminant dans toute affaire d’abus de biens sociaux réside dans le fait que le dirigeant détourne les biens de sa société à des fins personnelles. Ceux-ci peuvent être de différente nature.

Biens concernés

Qu’ils soient matériels (véhicule, argent en liquide, …) ou immatériels (créances, …), ces biens peuvent faire l’objet d’un abus de bien social.

Usage abusif

Est visé l’usage des biens ou du crédit qui porte atteinte au patrimoine de la société.

L’usage abusif des biens peut prendre diverses formes : le dirigeant peut disposer personnellement de fonds de sa société de manière officielle à travers une rémunération excessive par exemple, ou effectuer l’opération de façon dissimulée à travers le détournement de fonds bancaires.

Un abus de biens sociaux peut aussi résulter de la simple utilisation par le dirigeant de biens de la société à des fins exclusivement personnelles (véhicule, matériel, salariés utilisés pour des besoins étrangers à l’activité sociale etc.).

L’usage abusif de crédit visé par les textes incriminateurs s’entend par ailleurs de la réputation de la société et de sa capacité à passer des actes juridiques (cautionnement par la société d’un prêt contracté à titre personnel par son dirigeant auprès d’un établissement bancaire).

PRESCRIPTION PARTICULIÈRE DU DÉLIT D’ABUS DE BIENS SOCIAUX

Le délit d’abus de biens sociaux connaît un régime particulier, d’inspiration jurisprudentielle, conduisant à permettre de poursuivre de nombreuses années après sa commission réelle, ce qui peut apparaître comme injuste et le dissocie des autres atteintes aux biens (escroquerieabus de confiance).

En effet, si comme tout délai, le délai de prescription est triennal, le point de départ de ce délai est de manière tout à fait singulière fixé non à la date de la commission mais celle de la découverte de l’infraction lorsque l’usage abusif punissable a été dissimulé par son auteur.

Dans les autres cas, la Cour de cassation a jugé que le délai de prescription commençait à courir à la date de présentation des comptes annuels par lesquels les dépenses litigieuses sont mises à la charge de la société.

La lourdeur, la diversité et les conséquences que peuvent avoir les peines encourues pour le délit d’escroquerie rendent indispensable d’être assisté d’un avocat pénaliste.

VICTIME DE L’ABUS DE BIENS SOCIAUX

Seule la société dont les biens ont été détournés peut être considéré comme victime d’abus de biens sociaux. Celle-ci peut se constituer partie civile à travers son représentant légal. Comme c’est le cas pour une personne physique en cas d’abus, elle peut également être indemnisée pour son préjudice matériel et moral.

Lorsque le représentant social lui même est concerné, les associés se constituent partie civile au nom de la société. Cette opération s’effectue à travers l’action « ut singuli », mais les éventuels dommages et intérêts obtenus seront versés à la société victime.

Ainsi, la Cour de cassation considère que le délit n’occasionne un dommage indemnisable qu’à la société elle-même. De ce fait, aucun associé ne peut demander une indemnisation individuelle et ce, même s’il existe un préjudice indirect du fait de l’appauvrissement de la société.

Dans le même ordre d’idée, les créanciers, les syndicats ou le comité d’entreprise ne peuvent pas se constituer partie civile.

Pour toutes ces personnes il existe toutefois d’autres voies pour rechercher une indemnisation de la part du dirigeant fautif dans le cadre de procédures civiles.

INDEMNISATION DES VICTIMES D’ABUS DE BIENS SOCIAUX

A l’issue de la procédure, les victimes constituées parties civiles pourront obtenir devant la juridiction de jugement la condamnation du ou des auteurs de l’escroquerie.

En effet, il n’est pas rare que le ou les auteurs de l’escroquerie apparaissent insolvable, et qu’il soit impossible d’exécuter les dispositions civiles du jugement.

Il est possible durant l’instruction préparatoire que le juge d’instruction prenne des mesures conservatoires, dans le cadre du contrôle judiciaire qu’il fixe (cautionnement) ou distinctement (saisies pénales), de nature à garantir l’indemnisation effective à l’issue de la procédure.

De telles démarches sont d’autant plus opportunes qu’il n’existe pas (ou presque) de mécanisme de garantie, comme en matière d’atteintes aux personnes (Fonds de Garantie des Victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions) ou d’accidents de la circulation (Fonds de Garantie Automobile).

Il est donc indispensable de se rapprocher le plus tôt possible d’un avocat habitué à intervenir en droit pénal des affaires, qui pourra initier de telles démarches ou s’assurer que la Justice les met en oeuvre. Pour plus d’informations, faites appel à Maître Philippe MEILHAC, votre avocat en droit pénal des affaires à Paris.

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